N'est-on pas censé être installé avec une maison, une voiture et une petite barriere blanche à 45 ans ? N'êtes-vous pas censé partir à l'aventure quand vous avez 20 ans, avant d'avoir des enfants, pour pouvoir prendre votre retraite et jouer au golf ou autre chose ? N'est-ce pas la chose "normale" à faire ?
La normalité est quelque chose que je n'ai jamais su faire. Alors oui, j'ai fini par avoir des enfants et j'ai complété cette aventure par tout le confort matériel qui était le plus approprié à l'époque. L'idée de voyager avec des enfants nous a traversé l'esprit en tant que jeunes parents, mais l'enseignement à domicile n'existait pas encore en 1999. La question était plutôt école française ou école anglaise ?
Une fois que l'on a goûté à l'aventure et au voyage, le virus ne disparaît pas. J'aurais aimé pouvoir voyager davantage avec mes enfants quand ils étaient petits, au moins pendant les vacances scolaires, mais en tant que mère célibataire qui travaille, c'était tout simplement trop cher, malheureusement. Est-ce que je considère que je n'ai pas réussi à leur faire découvrir le monde, à leur apprendre l'amour du voyage ? Certainement. Mais c'est comme ça, et m'en vouloir n'apporte rien.
Je me suis promis, lorsqu'ils étaient petits, de donner tout ce que j'avais de moi-même pour les élever jusqu'à la fin de leur scolarité, et qu'après cela, j'abandonnerais toute responsabilité. Enfin pas du jour au lendemain évidemment... mère un jour, mère toujours... et ce n'est pas parce qu'ils ont eu 18 ans qu'ils vont s'envoler comme par magie hahaha !
Le jour où mon plus jeune a passé son dernier examen de fin d'études secondaires, un poids énorme m'a été enlevé des épaules. Ça y est ! C'est le jour que j'attendais depuis que j'avais fait cette promesse. C'était très émouvant de penser que toutes ces années de dur labeur étaient enfin terminées. Et maintenant ? Wow, toutes les possibilités auxquelles je ne m'étais même pas permis de penser auparavant se sont soudainement bousculées en foule devant mes yeux intérieurs.
Trois mois plus tard, Covid a fait son entrée dans le monde et la foule est devenue un chose inconnue. De bureau entre 8h et 17h (ou plus tard), je suis passé à la grasse matinée, au travail d'une heure ou deux dans la journée, et à regarder beaucoup, beaucoup, beaucoup de documentaires sur YouTube (dont je ne connaissais pas l'existence avant cela). J'ai redécouvert le monde à travers le petit écran, si vous voulez bien le croire. J'ai exploré la France et l'Inde et j'ai appris à connaître les pierres précieuses et la culture du cacao. Mon esprit a commencé à vagabonder plus loin que le monde routinier auquel il s'était habitué au cours des 15 dernières années.
Ayant récemment commencé un nouveau hobby - enregistrer des voix off pour de l'argent de poche depuis le bureau de ma chambre, j'ai réalisé pendant les confinements qu'il y avait beaucoup de travail disponible dans ce domaine, meme pas derangé par la situation sanitaire. À tel point que j'ai fini par dire à mon employeur que j'allais me concentrer sur les clients avec les moyens de me payer au lieu de compter sur un salaire devenu peu fiable. Et c'est ainsi que je suis devenue une voix-off freelance à plein temps, en août 2020.
Deux choses se sont produites en 2021.
Premièrement, j'ai très rapidement remplacé complètement mon ancien salaire de cette manière, et ce en ne travaillant que quatre à six heures par jour, en me réveillant au bon vouloir de mon corps et en ayant le temps de simplement profiter d'Exister.
Deuxièmement, un de mes cousins en France a annoncé la date de son mariage pour cet été-là. Il était hors de question que je rate ça. Même en plein milieu d'une pandémie. La situation étant un peu plus ouverte en juin 2021, je me suis retrouvé sur un vol entre l'Afrique du Sud et la France avec six semaines entières pour moi toute seule. Pas d'employeur à attendre mon retour, pas de vacances scolaires pour limiter le temps d'absence. Pas d'enfants ni de mari qui attendent mon retour. Mes deux enfants étaient parfaitement heureux d'expérimenter la liberté de vivre seuls sans moi.
Pendant ces six semaines d'été, j'ai renoué avec ma famille que je n'avais pas vue depuis des années et j'ai exploré la France toute seule en la parcourant en train de ville en ville, la valise à la main et le matériel d'enregistrement sur le dos. J'ai réalisé qu'il était tout à fait possible de travailler en faisant la route, et même d'enregistrer un son acceptable dans des installations de fortune, où que j'aille. C'est ainsi qu'est né ce rêve de nomade digital.
La seule chose qui me rappelait que j'avais 45 ans et non 25 était que je n'étais pas en forme. Courir pour attraper les trains, dormir dans un endroit différent tous les deux jours et marcher huit heures par jour dans des villes et des villages magnifiques était assez épuisant. Mais la liberté que je ressentais là était la même qu'à l'époque de ma jeunesse. Et en 1998, l'internet mobile et le travail à distance n'existaient pas. À ma connaissance. Pas comme aujourd'hui en tout cas.
La conclusion était donc simple. Pourquoi m'asseoir à la maison au même bureau tous les jours, regarder des documentaires sur le même canapé après le travail, et rouler sur les mêmes routes pour faire mes courses aux mêmes endroits tout le temps, alors que je pourrais faire tout cela en explorant de nouveaux horizons et en faisant de nouvelles rencontres ?
Pour enregistrer des voix-off professionnelles, il faut un peu plus d'équipement que pour travailler sur un ordinateur portable comme les autres nomades digitals, et les installations de fortune ne sont pas une solution idéale. Mais je pourrais voyager dans un studio d'enregistrement mobile, n'est-ce pas ? Je n'aurais pas à courir après les tableaux d'horaires et je ne serais pas limité à l'exploration des zones desservies par les trains...
Donc. #vanlife. J'arrive.