Et voici... Gus le Bus
J'ai trouvé mes roues !
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Louer une voiture à Saint Malo au milieu de la haute saison touristique ? Désolé, toutes les voitures sont réservées. Heureusement qu’il y a la gig-industrie ! C’est quand il y a urgence que l’on découvre la meilleure façon de faire les choses : les grosses compagnies de location de voitures sont tellement passés... J'ai fini par louer la voiture d'un particulier sur Ouicar - je l'ai récupérée à la gare routière et je suis partie en Normandie. En me répétant sans cesse, « on conduit à droite, on conduit à droite ». Sans même regarder tous les jolis paysages, pour ce trajet-là.
Et puis j'ai découvert Gus le Bus.
Un charmant couple de retraités dans un village en bord de mer, qui avait quarante ans d'expérience en camping-car, et abandonnaient leur toute dernière maison de vacances roulante - un Hymermobil b544 gris et bleu 2006 sur transporteur Fiat Ducato diesel 2,8l parfaitement entretenu. Exactement ce que je cherchait pour ma nouvelle résidence permanente. Dans ses 6,4 x 2,2 m, il dispose d'un lit escamotable au-dessus de la cabine de conduite, d'un long canapé-lit, d'une dinette à 4 places, d'une cuisinière à gaz avec four et d'une salle de bain avec douche. Et beaucoup d'espace de rangement à l'intérieur et en dessous. Allez, c’est suffisant pour la description technique. En bref, je suis amoureuse !!
Nous n'avons malheureusement pas pu repartir ensemble immédiatement comme il fallait organiser les papiers de l’assurance et faire le virement pour la vente, et je suis donc retournée à Saint-Malo pour apprécier la mer une dernière fois. Et je suis allée passer une semaine près de Nantes chez ma tante pour retrouver des cousins globe-trotters que je n'avais pas vus depuis très, très longtemps. Je n’y ai pas fait beaucoup de tourisme, comme j’étais assez préoccupée avec l’achat de Gus et de toute façon avec une nouvelle vague de chaleur j’étais contente de rester au frais. Il faudra donc que je revienne !
Et puis j'ai refait mes valises et pris le train du jeudi matin pour Rennes puis Coutances en Normandie. J'avais l'impression que ce serait mon tout dernier trajet en train, alors j'en ai savouré chaque instant, assez nerveuse à l’idée que d'ici quelques heures, je découvrirais comment se conduit un gros bus !
Ma bonne étoile a vraiment dû trouver ce vendeur pour moi car le couple est très gracieusement venu me chercher à la gare et ils m’ont reconduite chez eux où nous avons signé les derniers papiers de la vente, avant que je ne monte ma grosse valise rouge à bord - et le monsieur m'a même donné une longue leçon de conduite pour être certain que je me débrouillerais bien toute seule.
Et puis voilà.
Je me suis retrouvée à conduire Gus le Bus toute seule pour la première fois ! C'était tout de même un peu effrayant ! Je me sentais toute petite derrière cet immense tableau de bord avec les trois essuie-glaces et les énormes rétroviseurs. Dans lequel je regardais continuellement, gauche, droite, gauche, droite, pour m'assurer que j'avais assez de route à droite et que je n'étais pas au-dessus de la ligne blanche à gauche. Il m'est rapidement venu à l'esprit que j'aurais besoin de faire le plein si je devais remonter les 550 km vers le nord jusqu'à la ferme familiale. Conduire sur une route bien droite c’est une chose, mais est-ce que j'allais réussir à manœuvrer dans une station-service ? Je n'ai même pas pu m'arrêter pour en trouver une sur le GPS car je ne savais pas comment j'allais faire pour garer ce monstre ! J'ai donc suivi les panneaux jusqu'à la premiere ville, en espérant qu'il y aurait une station au bord de la route où il serait facile de s'arrêter. Et bien sûr, j'en ai trouvé une. Sans aucun autre client, heureusement, j’ai pu me ridiculiser sans que personne ne me voit. Parce que je n'avais jamais de ma vie fait le plein d'essence toute seule ! Imaginez, en Afrique du Sud c'est du jamais vu, il y a des employés professionnels pour ça. Je ne savais pas comment ouvrir le couvercle du réservoir de carburant... Ou même le fermer ! A la fin, j’ai réussi à le coincer solidement, et je l'ai laissé comme ça en espérant que je ne le perdrais pas… J'ai réglé mon GPS pour une Aire de Camping-Car que j'avais repérée sur l'appli Park4Night la veille, et hop c'est parti.
J'ai vite découvert que les conducteurs de camping-cars par ici se font signe lorsqu'ils se croisent sur la route, un peu comme nous le faisions dans les Land Rover en Afrique du Sud dans les années 90. Et soudain, j'ai eu l'impression d'être arrivée ! J'avais réalisé ce rêve que je portais depuis presque un an. J’ai rêvé, et j’ai mis ce rêve en action, pas à pas, jusqu'à ce qu'il devienne réalité ! L'émotion m’a submergée, juste là sur la route, en faisant des signes de main, ayant l’impression d’appartenir à quelque chose.
La Normandie nous a ouvert les bras à Gus et moi. Bien que tendue au volant, cette fois-ci je me suis laissé être émerveillé par le magnifique paysage - champs verdoyants bordés d’arbres, vaches noires et blanches broutant paisiblement dans les prés, ciel bleu… et puis les petits villages et les jolies vieilles maisons à colombages.
En France la limite de vitesse sur les routes régionales oscille entre 80, 70, 50 et 30km/h sans arret, j'ai donc bien eu le temps d’absorber tout le paysage. Cela m’a fait réaliser que conduire si lentement peut être bien agréable en fait ! Avec mes voitures passées, ça m'aurait rendu dingue, mais dans ce gros bolide, c'est tout simplement parfait. Je ne suis pas encore prête à prendre les virages à toute blinde, hahaha. J’arrive encore à peine à manoeuvrer les épingles et les ronds-points…
Et bien sûr, Google Maps ne m'a pas demandé la taille de mon véhicule avant de choisir mon itinéraire. Si j'avais su à quel point certaines de ces routes de campagne étaient étroites, je ne les aurais jamais empruntées !! Il m’a vraiment fait sauter dans le feu. Sur des petites routes bien étroites de la campagne Normande, j'ai croisé de gros tracteurs et j'ai dû bien me ranger sur le bas-côté pour qu’on puisse se passer - heureusement j'avais récemment eu un excellent professeur pour cela, puisque je venais de séjourner à Jersey, renommée pour ses routes très étroites (j'y ai refusé de conduire mais j'ai bien observé !)
A l'arrivée au spot de nuit, le GPS s’est trompé d’entrée, donc j’ai été forcée de faire un beau demi-tour : c'est comme ça qu'on apprend, il n’y a certainement rien de mieux !
C'était tellement magique de passer ma première nuit dans ma nouvelle maison ! J’avais beaucoup à apprendre là aussi. Dans la soirée j’ai dû sortir le mode d’emploi pour comprendre comment fermer les fenêtres latérales, hahaha. Je n'avais rien d'autre pour dormir que deux draps empruntés, je pensais que ça irait puisqu’il avait fait très chaud dans la journée, et j'avais ouvert le toit, mais j’ai découvert que la température baisse plutôt fort la nuit… De plus, dans ma hâte, je n'avais pas pensé à apporter assez d'eau à boire et j'ai eu vraiment soif avant de monter au village le matin pour prendre un café et des tartines. Heureusement que j'avais au moins pensé à m'acheter un sandwich à la gare de Rennes pour le diner. Et puis, c’est dommage que le distributeur d'électricité et d'eau aient été vandalisés par des villageois qui ne voulaient pas de camping-cars chez eux, j'aurais bien voulu les essayer…
Pendant ce temps-là, à la ferme familiale, mes oncles et tantes suivaient mon trajet sur Google Maps car j’avais partagé ma position avec eux. Alors quand je suis arrivée le lendemain, j'ai eu la surprise d’être rencontrée par tout un comité d'accueil ! J’ai garé mon engin en marche arrière comme si je faisais ça depuis toujours, et puis tout le monde s'est entassé pour découvrir mon nouveau jouet :)
Voilà déjà quelques semaines que je suis arrivée, et à chaque fois que j’abaisse le marchepied électrique et que j’ouvre la porte pour y entrer, je ressens une pointe de fierté, et aussi beaucoup de gratitude envers tous ceux qui m'entourent qui m'ont aidé à réaliser ce rêve ! Un été de voyage, hébergée en famille, et une place pour garer Gus pendant que j’accumule toutes les petites choses dont j'aurai besoin dans ma vie quotidienne à venir : depuis les couverts, jusqu’à la moutarde et la mayonnaise sans oublier bien sûr une bonne couverture bien chaude.
J'avais dit que j'attendrais la fin des vacances pour acheter mon camping-car, mais quand j'ai vu cette petite annonce tout près de là ou j’étais, je n'ai pas pu résister. Et après tout, changer mon plan a été la meilleure chose à faire puisque ça m’a donné trois semaines pour m'installer, acheter ce qu’il faut, et apprendre comment tout fonctionne - ce que je n'aurais pas eu le temps de faire si j'avais attendu jusqu'à maintenant, puisque je voudrais être à Montpellier début octobre pour un atelier de voix-off … Les plans ne sont que des lignes directrices après tout, et changer de route n'est pas toujours une mauvaise chose.
Comme dirait Confucious,
"Le roseau vert qui se plie sous le vent est plus fort que le puissant chêne qui se brise dans une tempête."
Restez à l'écoute car ma grande aventure ne fait que commencer. Très bientôt je prendrai les routes comme une tortue avec sa maison sur le dos, pour explorer tous les petits recoins de France, ce que j'aimerais partager avec vous ! et après la France, toute l'Europe, et puis qui sait où les vents m'emmèneront… Je n'ai que mes rêves à suivre.
